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15 mai 2011

"Admirons les fous, les médiums qui trouvent moyen de fixer leurs plus fugitives visions..."

Le titre du "petit plus du dimanche" cette semaine est une citation de Max Morise, dans le premier numéro de La Révolution surréaliste : Admirons les fous, les médiums qui trouvent moyen de fixer leurs plus fugitives visions, comme tend à le faire, à un titre un peu différent, l’homme adonné au surréalisme. C'est donc un dimanche surréaliste, entre capture des fugitives visions et écriture que je vous propose.

De septembre 2009 à janvier 2010, le Centre Pompidou, à Paris, présentait une exposition qui promettait d'être passionnante : La subversion des images - Surréalisme, photographie, film. Comme un certain nombre d'expos passionnantes, je l'ai évidemment manquée. Cependant, cela ne m'a pas empêchée de lire et de visiter, même de loin et virtuellement, le parcours de l'expo. On y voyait entre autre cette photographie de Man Ray, utilisée par la suite par André Breton dans l'Amour fou

J'aurais envie de parler de tout ce qu'elle évoque à titre personnel, mais me satisferai de mettre "en regard" image, mots et musique... même si la composition de Pierre Boulez s'éloigne du chemin surréaliste : L'idée d'"explosante fixe" était de confier un même noyau à plusieurs instruments qui, se présentant à des registres différents, le parcourraient chacun de façon différente. Le noyau explosait dans ces différents parcours, mais chaque tessiture était absolument fixe. J'ai donc baptisé la pièce, très littéralement, "explosante fixe".

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Pierre Boulez, Explosante-fixe (1973)

André Breton, Explosante-fixe (1937)

Man_Ray_Explosante_fixeLe 10 avril 1934, en pleine occultation de Vénus par la lune (ce phénomène ne devait se produire qu’une seule fois dans l’année), je déjeunais dans un petit restaurant situé assez désagréablement à côté d’un cimetière. Il faut, pour s’y rendre, passer sans enthousiasme devant plusieurs étalages de fleurs. Mais j’observais, n’ayant rien de mieux à faire, la vie charmante de ce lieu. Le soir le patron « qui fait cuisine » regagne son domicile à motocyclette. Les ouvriers semblent faire honneur à la nourriture. Le plongeur, vraiment très beau, d’aspect très intelligent, discute de choses apparemment sérieuses avec les clients. La servante est assez jolie : poétique plutôt.

Le 10 avril 1934, elle portait, sur un col blanc à pois espacés rouge fort en harmonie avec sa robe noire une très fine chaîne retenant trois gouttes claires, gouttes rondes sur lesquelles se détachait à la base un croissant de même substance pareillement serti. J’appréciai une fois de plus, infiniment, la coïncidence de ce bijou et de cette éclipse. Comme je cherchais à situer cette jeune femme, en la circonstance si bien inspirée, la voix du plongeur : « Ici, l’Ondine » et la réponse exquise, enfantine, à peine soupirée, parfaite : « Ah ! Oui, on le fait ici, l’on dîne ! » Est-il plus touchante scène ? Je me le demandais hier encore, en écoutant les artistes de l’atelier massacrer une pièce de John Ford.

La beauté convulsive sera érotique-voilée, explosante-fixe, magique-circonstancielle ou ne sera pas. [...]

Le mot convulsive, que j’ai employé pour qualifier la beauté qui seule, selon moi, doive être servie, perdrait à mes yeux tout sens s’il était conçu dans le mouvement et non à l’expiration exacte de ce mouvement même. Il ne peut, selon moi, y avoir beauté − beauté convulsive − qu’au prix de l’affirmation du rapport réciproque qui lie l’objet considéré dans son mouvement et dans son repos. Je regrette de n’avoir pu fournir, comme complément à l’illustration de ce texte, la photographie d’une locomotive de grande allure qui eut été abandonnée au délire de la forêt vierge.
(L'Amour fou, 1937)

Man Ray, Explosante fixe (1934)

 

 à feuilleter :

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