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25 novembre 2011

La valeur des livres

Née en septembre dernier, la People's Library (Bibliothèque populaire) d'Occupy Wall Street est une démarche spontanée de partage culturel et intellectuel alternatif, gratuite et ouverte à tous. En à peine deux mois, ce sont 5000 ouvrages (fiction, essais, pamphlets, magazines etc.) qui ont été collectés, donnés (par leurs auteurs parfois), rassemblés, classés, protégés des intempéries et mis à disposition de tous sur Liberty Plaza dans le Parc Zuccotti de New York. Action d'un genre nouveau à l'image de ces groupes de résistance nés un peu partout à la suite des indignados espagnols. Medium nouveau au service de la création de liens entre les gens, d'ouverture et de partage.

OWS-Peoples libraryLe 15 novembre dernier, Zuccotti Park était évacué par la police sur ordre du maire Bloomberg. Ce qu'on a moins su, en France en tous cas, c'est le sort réservé à cette People's Librairy. Dans le Guardian du 23 novembre, on apprend que, malgré la promesse des autorités que le fonds de la bibliothèque serait conservé en lieu sûr et dans son intégralité/intégrité, les bibliothécaires d'OWS ont eu la triste surprise de n'en récupérer qu'un tiers(moins de 1300 ouvrages) et dans un état déplorable, le reste ayant disparu pages et âme. Sur les 5000 ouvrages choyés, ne restent que 800 titres en état d'être lus. Selon Norman Siegel, ancien directeur de la New York Civil Liberties Union (organisation newyorkaise de défense des droits des citoyens), c'est la première fois, à sa connaissance, qu'une ville ou un état détruit une bibliothèque. Un précédent se crée, donc, qui a déclenché des réactions très vives parmi un grand nombre d'écrivains et d'organisations, dont l'American Library Association.

Reste à Bloomberg et à son administration de remplacer chaque ouvrage détruit et de fournir un lieu d'accueil sûr à cette librairie vivante. C'est en tout cas ce que demandent OWS et leurs soutiens.

fahrenheit-451Il n'est jamais bon, en effet, pour une société ou ses représentants officiels, d'en arriver à ce genre d'action extrême. Le catalogue, consultable en ligne sur le site de la People's Library, est impressionnant et très symbolique. On ne peut s'empêcher, en lisant certains témoignages sur l'expulsion de Zuccotti Park et de la bibliothèque, de penser (inconscient culturel collectif ou évidence ?) à Fahrenheit 451 - et personnellement à certains passages du film de Truffaut, dont la fin. Les choses se sont-elles passées réellement ainsi, ou l'émotion plus que compréhensible a-t-elle traduit quelque peu la réalité ? Il n'empêche, voici ce que raconte dans The Nation William Scott, professeur d'anglais à l'Université de Pittsburg, sur Stephen Boyer, poète et libraire d'OWS :

« [...] Alors que [les policiers] nous poussaient hors du parc avec leurs boucliers, leurs poings, leurs matraques et leurs gaz lacrymogènes, je me tenais à côté de Stephen et je regardais pendant que Stephen récitait des vers à pleins poumons en direction de l'armée de policiers anti-émeute qui arrivait. Une chose incroyable est alors arrivée. Plusieurs flics se sont penchés plus près pour entendre les poèmes. Ils ont un peu soulevé la visière de leur casque pour mieux percevoir les mots que Stephen leur criait, alors même que leurs copains continuaient à nous bousculer. Le lendemain, un officier qui gardait l'entrée du parc Zuccotti a dit à Stephen combien il avait été touché par sa poésie, combien il avait été ému de voir que nous aimions assez les mots et les livres pour risquer de subir des violences afin de défendre notre amour des livres et de protéger la connaissance qu'ils contenaient. [...]

[Le 16 novembre, après l'assaut final et le démantèlement définitif de la bibliothèque] au moment où les poubelles étaient enlevées, un homme est sorti de la foule tenant un livre dont il faisait don à la bibliothèque : Slouching Toward Bethleem de Joan Didion. Nous l'avons accepté avec joie, ajouté au catalogue, le mettant à disposition sous un nouveau panneau bibliothèque que nous avons fait sur une feuille vierge. Une véritable librairie populaire, après tout, ne dépend pas d'un nombre particulier d'ouvrages, puisqu'en fin de compte, c'est la manière dont ces livres sont rassemblés et prêtés aux gens qui importe. [...] »

[Photos : Occupy Wall Street's 'People's Library'. Karen McVeigh for the Guardian
Fahrenheit 451
, François Truffaut, 1966]

 

Lire les deux articles cités plus haut :

Destruction of Occupy Wall Street 'People's Library' draws ire (The Guardian, Nov. 23)

The People's Library of Occupy Wall Street Lives On (The Nation, Nov. 22)

Pour en apprendre davantage sur la People's Library d'OWS, clic :

OWS library

 

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