Prendre grand soin
Sortir délicatement la cafetière à piston du placard. Délicatement car l'heure est trop matinale pour assurer le geste.
Ouvrir la boîte de café et se dire, à l'odeur et malgré l'aube timide, que c'est bien le matin.
Pleuvoir la poudre magique, sombre comme le tronc des arbres par la fenêtre, dans le verre de la cafetière ; à vue de nez savoir quand s'arrêter. Noter que dehors, il ne pleut pas encore.
Lorsque la bouilloire se met à chanter, verser l'eau frémissante, en glouglous sourds.
Laisser un peu infuser, pas trop car le sommeil risquerait de vous reprendre debout, par surprise.
Enfin, lentement, enfoncer le piston et admirer, comme à chaque fois, combien l'air sent bon.
Oublier un instant qu'il faut se dépêcher.
Sortir délicatement la bouteille du fond du freezer. Délicatement car il s'agit de n'en pas réveiller le contenu en hibernation.
Décapsuler la bouteille, d'un geste assuré et se dire, au contact glacé sur la paume, que c'est bien le soir.
Pencher le verre d'une main, la bouteille de l'autre, et admirer l'ambre claire, comme le soleil derrière les nuages, couler de l'autre à l'une ; à vue d'oeil savoir quand s'arrêter. Noter que dans le verre, la mousse est fine et que dehors, le soleil poindrait presque.
Enfin, lentement, porter le verre aux lèvres et sourire à l'amertume qui vient légèrement chatouiller le palais.
Oublier un instant qu'il y a encore beaucoup à faire.
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Aujourd'hui, deux actions soignées